Dimanche 12 octobre 2025
Saint-Lambert-des-Bois
41e édition du Pèlerinage à Notre-Dame-de-vie
« Notre monde peine à trouver une valeur à la vie humaine, même
en sa dernière heure : que l’Esprit du Seigneur éclaire nos
intelligences, pour que nous sachions défendre la dignité
intrinsèque de toute personne humaine. »
Léon XIV
Face aux attaques qui pèsent toujours sur la famille, pour la défense de la Vie, pour les femmes en attente de maternité, le Pèlerinage vers Notre Dame-de-Vie (Saint-Lambert-des-Bois, Yvelines) est plus que jamais d'actualité.
Cette année, 1 seul itinéraire : 6 km, accessible aux poussettes. RDV à partir de 9h30 au Mérantais sur la D36 entre Voisins-le-Bretonneux et Châteaufort. Café d’accueil sur place. Départ 10h précises. À l’arrivée, messe à 12h15 en l’église de Saint-Lambert-des-Bois. Pot de l’amitié à la sortie de la messe. Pique-nique (non fourni) vers 13h15 dans le parc du prieuré. Des navettes pour récupérer les voitures laissées au départ seront organisées. Participation aux frais : 6€ par famille. Renseignements complémentaires au 06 07 53 48 52.
Lorsque j’ai lancé Chrétiens dans la Cité, il y a 29 ans, je présentais, dans le premier numéro, la préparation des Journées mondiales de la jeunesse qui allaient réunir un million de jeunes à Paris en août 1997. Les commentateurs constatèrent alors le développement d’une génération Jean-Paul II animée par le projet d’une nouvelle évangélisation. Dans cette perspective, Chrétiens dans la Cité se voulait être un outil de communication au service de toutes les initiatives prises par les chrétiens dans la vie sociale, économique et politique : famille, école, entreprise, institutions… Lettre d’information inspirée par la doctrine sociale de l’Église, elle accompagna les nombreux combats pour la vie et la famille, suscitant des rapprochements
entre des acteurs qui auparavant ne se connaissaient guère.
Il y eut ensuite une génération Benoît XVI, marquée par la profondeur spirituelle de Joseph Ratzinger. Nombre de jeunes se souviennent avec émotion des JMJ de Madrid, avec cette veillée pendant laquelle près de deux millions de jeunes adorèrent le Saint Sacrement en silence en présence du pape théologien allemand.
Il y eut ensuite une génération François, sensible au péril écologique dénoncé dans l’encyclique Laudato Si’.
Et voici maintenant qu’émerge une génération Léon XIV. Venus à Rome à l’occasion de l’année jubilaire, un million de jeunes ont fait la connaissance de ce pape venu d’Amérique. Lui aussi leur a dit : « Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde!… Restons unis à Lui, au Christ, restons dans son amitié, toujours, en la cultivant par la prière, l’adoration, la communion eucharistique, la confession fréquente, la charité généreuse. » Telles sont bien les armes du chrétien. Lui aussi a rappelé que dans un monde ensanglanté par la guerre (il y aurait actuellement plus de soixante conflits armés sur la planète), la paix devrait être un objectif pour tous les chrétiens. Et l’on devine déjà que l’une de ses priorités pastorales sur le siège de Pierre sera de contribuer à restaurer la paix et l’unité dans l’Église après des années pour le moins tumultueuses.
Nul doute que vont naître de nouveaux projets, que la nouvelle équipe de Chrétiens dans la Cité aura à coeur de vous faire connaître. Comme annoncé avant les vacances, je continuerai d’y apporter de temps à autre ma contribution.
Denis Sureau
Les Éditions Téqui reprennent la lettre d'information Chrétiens dans la Cité et la couplent avec leur propre publication Discours du Pape et Chronique romaine.
Éditée sans interruption depuis octobre 1996 par Denis Sureau, la lettre Chrétiens dans la Cité propose des informations brèves sur les initiatives prises par les chrétiens de diverses origines et sensibilités dans la vie sociale, économique et politique : famille, école, entreprise, institutions... Elle est devenue au fil des ans un outil de référence par de nombreux responsables d'associations, personnalités religieuses, élus politiques, cadres et dirigeants.
Depuis 1957, les Discours du Pape offrent à la fois les principaux textes et déclarations des papes, notamment les discours des audiences du mercredi et ceux des Angélus du dimanche, ainsi que des chroniques et des textes d’autres instances du Vatican.
Le couplage de ces deux publications à partir du numéro du 28 août 2025 permettra de couvrir la doctrine et l’action catholique, dans la vie personnelle (spirituelle et morale) comme dans la vie sociale. Dans un format maniable et synthétique (16 pages A5 tous les quinze jours), Discours du pape et vie des chrétiens dans la Cité offrira à ses lecteurs un accès rapide à l'actualité de notre Église. La nouvelle publication est disponible en format papier ou en pdf. Une nouvelle équipe éditoriale assurera la rédaction, avec des contributions ponctuelles de Denis Sureau.
Le 465e numéro de la lettre Chrétiens dans la Cité vient de paraître. C'est le dernier réalisé par Denis Sureau, qui passe le relais à une équipe plus jeune.
Au sommaire
ANALYSE : L'Eglise vue en France - L’enquête Ifop commandée par l’Observatoire français du catholicisme décrit à la fois l’ampleur de la déchristianisation et des tendances qui peuvent être des points d’appui pour l’évangélisation.
ACTU - Socialiste et lesbienne : la nouvelle présidente des Guides et Scouts de France - Oykos : sauver les lieux spirituels -Habitat et Humanisme promeut l'habitat mixte - Chartres : l'essor d'un pèlerinage - Lejeune Académie - Congrès CVX à Strasbourg - Films chrétiens à la demande - Jesus Festival
FIGURES : Vincent Aubin - Vianney - Guillaume Nicolas - Désiré Doué
Alasdair MacInture vient de mourir à l'âge de 96 ans. Voici le chapitre que je lui ai consacré dans mon livre Pour une nouvelle théologie politique (Parole et Silence, 2008) :
Né en 1929 à Glasgow, Alasdair Chalmers MacIntyre a étudié au Queen Mary College de Londres, puis à Manchester et Oxford avant d’enseigner à Manchester, Leeds, Essex et Oxford. En 1953, il publie son premier livre, consacré au marxisme.1 En 1969, il émigre aux États-Unis. Il enseigne au Wellesley College puis dans diverses universités : Vanderbilt, Princeton, Brandeis, Boston, Duke, Yale et surtout dans la grande université catholique Notre-Dame, dans l'Indiana. Il a épousé en troisièmes noces la philosophe Lynn Joy.
Parmi sa trentaine d’ouvrages, trois d’entre eux ont eu un fort retentissement, marquant un nouveau départ dans la philosophie morale contemporaine: Après la vertu en 19812, suivi sept ans plus tard par Quelle justice ? Quelle rationalité ? puis Trois versions rivales de l’enquête morale : Encyclopédie, Généalogie et Tradition, en 1990. Ces dernières années, il a rassemblé des séries d’études publiées dans des ouvrages collectifs dans deux livres : The Tasks of Philosophy et Ethics and Politics: Selected Essays. Plus récemment, il s’est intéressé à l'œuvre philosophique d'Édith Stein.
L’itinéraire intellectuel de MacIntyre est pour le moins étonnant. Il a été membre du Parti communiste à 20 ans, militant de la Nouvelle Gauche à 30 (comme les futurs philosophes communautariens Charles Taylor et Michael Walzer5), puis vaguement trotskiste. Au plan religieux, de confession presbytérienne, il devient anglican, perd la foi vers 1960 avant de se convertir au catholicisme en 1983. Sa pensée a été particulièrement marquée par le jeune Marx, Karl Barth, Ludwig Wittgenstein, Aristote et saint Thomas.
Au sujet de son évolution à la fin des années 80, MacIntyre déclare : « je me suis aperçu que mes convictions philosophiques étaient devenues celles d’un aristotélicien thomiste, chose qui m’a au départ surpris ».6 Depuis il déclare développer une « approche thomiste augustinienne de la philosophie morale ».
Contre la modernité libérale
Il faut savoir repérer les éléments de continuité dans cet itinéraire brouillé. Émile Perreau-Saussine remarque : « Comme marxiste, barthien, wittgensteinien, aristotélicien, thomiste, MacIntyre place au cœur de sa réflexion ce que le libéralisme tient aux marges de la politique : l’âme, la communauté et la vérité. Une constante se dégage ainsi, sous le chaos apparent. La critique du libéralisme est à la fois la basse continue et la cause finale de son œuvre. »
Pour être plus précis, le libéralisme équivaut dans la pensée de MacIntyre à la conception politique moderne qui fonde le système actuel et les différents partis qui y participent, du conservatisme à la social-démocratie. L’opposition entre individualisme et collectivisme, défense de la liberté individuelle et défense de la régulation bureaucratique des liens est fondamentalement factice : « L’essentiel est en fait ce sur quoi les parties en présence s’accordent : il n’existe que deux modes de vie sociales possibles, l’une où les choix libres et arbitraires des individus sont souverains, l’autre où la bureaucratie est souveraine, précisément pour limiter les choix libres et arbitraires des individus. Tant donné ce profond consensus culturel, il n’est pas étonnant que la politique des sociétés modernes oscille entre une liberté qui n’est qu’une absence de régulation du comportement individuel et des formes de contrôle collectiviste ne visant qu’à limiter l’anarchie des intérêts privés. »
Ni individualisme ni étatisme, ni libéralisme ni communisme. Le marxisme, que MacIntyre a étudié avec bienveillance, n’échappe pas à cette convergence : « comme l’individualisme libéral, le marxisme incarne l’ethos du monde spécifiquement moderne et modernisateur, et de là viennent ses défaillances morales ; cet ethos doit être en grande partie abandonné si nous voulons trouver une base rationnellement et moralement défendable pour juger et agir et pour évaluer divers schémas moraux hétérogènes qui rivalisent pour obtenir notre allégeance. »
Retrouver la morale
Après la vertu s’ouvre sur le constat de la confusion morale : nous disposons d’un « simulacre de morale » dont nous avons perdu la compréhension. Notre société est compartimentée et notre éthique fragmentée : chaque domaine d’activité a ses propres normes, son propre langage et son style spécifique. Nous ne pouvons plus parvenir à un accord : « je n’affirme pas seulement que la morale n’est plus ce qu’elle était, mais aussi et surtout que ce qui était la morale a largement disparu ». Il énonce ainsi sa thèse : « les pratiques et discours moraux modernes ne peuvent être compris que comme des survivances fragmentaires d’une époque antérieure, et les problèmes qui en résultent pour les théoriciens modernes de la morale resteront insolubles tant que cela n’aura pas été bien compris. »
Pour Aristote, l’éthique est la science qui doit permettre de passer de « l’homme tel qu’il est » à « l’homme tel qu’il pourrait être s’il réalisait sa nature essentielle ». Pas de morale sans telos, sans finalité humaine. Or cette conception a volé en éclat, surtout au siècle des Lumières. Le projet de MacIntyre est de retrouver une conception de la morale par-delà le relativisme et le subjectivisme, sans pour autant retomber dans l'universalisme abstrait de type kantien justement critiqué par Nietzsche.
MacIntyre refuse le positivisme dominant qui sépare les faits des valeurs, la science de la morale, nos actions de nos raisons d’agir. Dans une de ses amusantes formules dont il a le secret, MacIntyre déclare contre les positivistes : « les faits, comme les télescopes et les perruques pour messieurs, sont une invention du XVIIe siècle ». Les raisons d’agir ne sont plus, dans la modernité scientiste, que des « valeurs » - subjectives – ou des émotions déguisées distinctes des causes réelles (émotivisme). Dès les années cinquante, MacIntyre a entrepris de réhabiliter le caractère rationnel de l’intention. S’inspirant de Wittgenstein et de sa disciple Elizabeth Anscombe (convertie au catholicisme), il y parvient avec une conception narrative de l’existence. Pour cela, il utilise deux concepts : celui de pratique (practice) et celui de tradition de pensée.
Nos vies sont des histoires et des récits : « l’homme est par essence un animal conteur d’histoires ». Pour MacIntyre, « le caractère de l'action même est historique. C'est parce que nous vivons des récits dans notre vie et parce que nous comprenons notre propre vie en fonction de ces récits que la forme du récit est appropriée pour comprendre les actions d'autrui. Les histoires sont vécues avant d'être racontées, sauf dans le cas de la fiction. »
Les intentions s’inscrivent dans un contexte et des pratiques socialement instituées : l’intention de jouer aux échecs présuppose un pratique du jeu d’échecs. Cette éthique est une éthique des vertus. « Une vertu est une qualité humaine acquise dont la possession et l’exercice tendent à permettre l’accomplissement des biens internes aux pratiques et dont le manque rend impossible cet accomplissement. »16 L’excellence du joueur d’échec s’acquiert dans la pratique du jeu d’échecs. Le bien est interne à une pratique et ne peut être poursuivi en dehors d’elle.
Ce que MacIntyre veut dire, c’est que l’action de l’homme s’insère toujours dans des pratiques sociales. Le concept d’enchâssement (embodiement) est au cœur cette pensée narrative :
« l'histoire de ma vie est toujours enchâssée dans l'histoire de ces communautés dont je tire mon identité. Je suis né avec un passé; vouloir me couper de ce passé, sur le mode individualiste, c'est déformer mes relations présentes. La possession d'une identité historique et la possession d'une identité sociale coïncident ».17
L'homme moral est enraciné, inséré, intégré dans une communauté et une tradition. « Dans de nombreuses sociétés traditionnelles, prémodernes, c’est par son appartenance à divers groupes sociaux que l’individu s’identifie et est identifié par les autres. Je suis frère, cousin et petit-fils, membre de cette maisonnée, de ce village, de cette tribu. Ces caractéristiques ne sont pas accidentelles, on ne peut les ôter pour révéler le vrai « moi ». Elles font partie de ma substance, elles définissent, au moins en partie et parfois entièrement, mes obligations et mes devoirs. »
C’est en remplissant ses devoirs d’état, en tenant un ensemble de rôles, que l'homme s’épanouit. Il ne peut s’abstraire de son environnement et de son histoire et élaborer sa propre morale autonome et créer ses propres valeurs. C’est l’illusion des Lumières pour lesquelles l’individu doit se libérer des « préjugés » et des « superstitions » de son milieu pour atteindre l’universel.
A l’appartenance à des communautés comme la famille, la tribu ou la ville s’ajoute l’insertion dans une histoire : « Ce que je suis est donc largement ce dont j’hérite, un passé spécifique plus ou moins présent dans mon présent. Je me découvre comme appartenant à une histoire, c’est-à-dire, que cela me plaise ou non, que je l’admette ou non, l’un des porteurs d’une tradition. »
La raison individuelle s’inscrit donc dans une tradition propre à la communauté d’appartenance. Cette position a été parfois été accusée de relativisme. C’est peut-être la pire injure que l’on puisse faire à MacIntyre, qui n’a jamais cessé de combattre le relativisme. Reconnaître l’existence de « versions rivales de l’enquête morale » n’implique ni la négation de l’unité de l’humanité, ni l’incommunicabilité entre les cultures : « nous sommes des animaux rationnels qui transcendent les cultures ». Il y a bien une nature humaine, mais celle-ci ne s’épanouit que dans la vie sociale ; il y a bien une loi naturelle, mais elle ne s’exprime qu’à travers des contextes particuliers, des traditions morales et politiques, et ne se réduit pas au catalogue des droits de l’homme. « Une morale qui ne serait la morale d’aucune société particulière n’existe pas. Il y eut « la morale d’Athènes au IVe siècle », « les morales de l’Europe occidentale au XIIIe siècle », il en existe de nombreuses autres, mais où vit-on jamais la morale en soi ? »
MacIntyre critique les droits de l’homme, droits subjectifs universels. Il note l’absence avant 1400 environ dans les diverses langues de l’expression pouvant être traduite par l’expression « un droit ». Et il a cette affirmation brutale : « Ne nous égarons pas, la vérité est simple : ces droits n’existent pas, et croire en eux, c’est croire aux sorcières et aux licornes. » Ce sont des fictions, créées comme substituts aux concepts de la morale traditionnelle, formant un couple avec la notion d’utilité.
L’éthique dans la politique
On retrouve ici la perspective platonicienne, aristotélicienne et thomiste classique : l’homme a un désir rationnel ou naturel de vivre en société. Animal social, il a besoin des autres pour vivre. Cette philosophie morale est ainsi directement politique. Par son exaltation de la raison individuelle autonome, l’individualisme libéral détruit non seulement le bien commun mais la condition même de l’action morale. L'État libéral ne survit que grâce à la persistance de traditions non-libérales (comme le patriotisme), qu’il mine pourtant progressivement. Nous vivons après la vertu.
Au reste, on ne peut séparer la morale (individuelle) de la politique. MacIntyre réhabilite la grande leçon d’Aristote sur l’éthique comme partie de la politique : l’homme ne peut rechercher le bien qu’à l’intérieur d’une communauté politique. La loi naturelle n’est connue et n’a de portée que lorsqu’elle est traduite en termes positifs, en quelque sorte incarnée à l’intérieur d’une « communauté de pratique ».
Ni l'État, ni la législation ne sont neutres. Or l’une des caractéristiques de la vie politique moderne est qu’elle exclut tout débat philosophique sur les principes fondateurs. Philosophie et politique sont devenus deux domaines spécialisés. Recherche intellectuelle et débat politique sont aujourd’hui antinomiques. Les professionnels de la politique excluent tout confrontation avec des questions fondamentales (par exemple la valeur d’un mode de vie) risquant de remettre en cause le fonctionnement de systèmes oligarchiques sous apparence de démocraties. MacIntyre remarque : « les débats contemporains au sein des systèmes politiques modernes opposent presque exclusivement des libéraux conservateurs, des libéraux centristes et des libéraux de gauche. Cela ne laisse que peu de place pour la critique du système lui-même, c’est-à-dire pour la remise en question du libéralisme. »
Ce consensus est un consensus qui exclut la recherche du bien commun. La pluralité des intérêts, la compétition entre groupes rivaux, l’absence d’un niveau suffisant de culture partagée sont telles que toute réflexion sur les finalités et les limites du politique est désormais impossible.
Communautarisme ?
MacIntyre est hostile à l'État-nation qui s’est construit en détruisant les corps intermédiaires, les traditions, les hiérarchies sociales. Dans une formule célèbre il s’est exclamé : « Mourir pour l'État moderne, c’est renoncer à sa vie pour un opérateur de téléphonie. » Il repousse pourtant la critique anarchiste de l'État : « Rien dans mon raisonnement ne suggère ni n’implique qu’il faille rejeter certaines formes de gouvernement ; je prétends seulement que l'État moderne n’est pas une forme nécessaire ou légitime. La tradition des vertus est en désaccord avec certains éléments centraux de l’ordre économique moderne, particulièrement son individualisme, son désir d’acquisition et la primauté qu’il accorde aux valeurs marchandes. On voit maintenant qu’elle implique aussi un rejet de l’ordre politique moderne. Cela ne supprime nullement de nombreuses tâches qui ne peuvent être accomplies que par le gouvernement : il faut faire respecter la loi, autant que cela est possible dans un État moderne, il faut lutter contre l'injustice et la souffrance injustifiée, il faut être généreux et défendre la liberté, par des moyens qui ne sont souvent accessibles que par les institutions gouvernementales. Mais chacune de ces tâches, de ces responsabilités, doit être évaluée selon ses propres mérites. La politique systématique moderne, qu'elle soit libérale, conservatrice, radicale ou socialiste, doit être rejetée d'un point de vue qui fait réellement allégeance à la tradition des vertus, car la politique moderne elle-même exprime sous ses formes institutionnelles un rejet systématique de cette tradition. »
Face à la dissolution du lien social, la solution devrait être cherchée du côté des communautés locales (famille, paroisse, université, association…) agressées tant par l’individualisme de marché que par l'État-Providence. La véritable politique émerge dans des communautés locales car celles-ci sont les plus favorables au développement d’un savoir partagé et à la découverte d’un bien commun. C’est aussi à l’intérieur de sociétés de petite taille qu’une participation délibérative est possible, que les citoyens peuvent poser leurs questions aux détenteurs de la fonction politique, avoir et parvenir à une opinion commune.
Pourtant MacIntyre n’est pas communautariste au sens français d’un terme d’ailleurs fort polysémique. Il voit plutôt dans le communautarisme une forme d’individualisme qui commet l’erreur de s’accommoder de la politique moderne. C’est encore l’individu souverain qui choisit librement son identité (homosexuelle, par exemple), ce qui n’a rien à voir avec l'appartenance à une communauté stable (une province, par exemple) et l’enracinement dans une tradition morale. Le communautarisme et le multiculturalisme sont des relativismes qui trouvent leur place à l’intérieur de certaines versions de la théorie libérale. Dans la pratique, l'État libéral jongle en permanence avec des intérêts catégoriels, et les professionnels de cette politique avec des promesses (souvent non tenues). Les valeurs communautariennes coexistent ainsi plus ou moins bien avec les valeurs libérales : « la conception communautarienne du bien commun n’est pas du tout l’idée d’une communauté d’apprentissage politique et de participation à la recherche grâce à laquelle les individus découvrent leur bien individuel et commun. Dans toutes les prises de position des protagonistes du communautarisme dont j’ai eu connaissance, la nature précise du point de vue communautaire spécifique concernant rapport entre communauté, bien commun et biens individuels, reste floue. Mais peut-être ce flou est-il la condition pour que les communautariens puissent se conformer, comme ils l’ont fait nettement dans certains cas, à la réalité de la politique contemporaine. »
Une théologie politique ?
A la fin d’Après la vertu, on lit cette ouverture qui alliait lucidité et espérance : « Un tournant capital dans la chute de Rome est le moment où les hommes de bonne volonté cessèrent d'étayer l'imperium et d’identifier la continuation de la civilité et de la communauté morale avec le maintien de cet imperium. Sans en être toujours conscients, ils se consacrèrent dès lors à la construction de nouvelles formes de communauté où la vie morale pouvait être soutenue et ainsi permettre à la morale et à la civilité de survivre à la barbarie à venir. Si mon exposé de notre condition morale est correct, il faut conclure que nous sommes, nous aussi, parvenus à ce tournant. Nous devons nous consacrer à la construction de formes locales de communauté où la civilité et la vie intellectuelle et morale pourront être soutenues à travers les ténèbres qui nous entourent déjà. Si la tradition des vertus a pu survivre aux horreurs des ténèbres passées, tout espoir n'est pas perdu. Cette fois, pourtant, les barbares ne nous menacent pas aux frontières; ils nous gouvernent déjà depuis quelque temps. C'est notre inconscience de ce fait qui explique en partie notre situation. Nous n'attendons pas Godot, mais un nouveau (et sans doute fort différent) saint Benoît. »
Cette attente n’a en tout cas pas été vaine pour MacIntyre qui, peu après, entrait dans la pleine communion de l'Église catholique. Toutefois cette conversion ne signifie pas qu’il ait été auparavant indifférent aux réalités théologiques, même si son discours est avant tout philosophique.
Dès 1953, il dénonçait le péché originel de la modernité séculière : « La division de la vie humaine entre le sacré et le profane (secular) vient naturellement à l'esprit occidental. C'est une division qui porte les marques d'une origine chrétienne, en même temps qu'elle témoigne de la mort d'une culture proprement religieuse. Lorsque le sacré et le profane sont séparés, alors la religion n'est plus qu'un compartiment de l'existence, une activité parmi d'autres. C'est ce qui est arrivé à la religion bourgeoise. Du lundi au vendredi, l'on gagne sa vie. Le samedi et le dimanche, on se repose et, si on le désire, on accomplit ses obligations religieuses. La politique, l'industrie, l'art - tel est le genre de liste auquel il convient d'ajouter la religion. Mais la religion comme activité divorcée des autres activités est sans objet. Si la religion n'est qu'une partie de la vie, alors la religion est devenue une option. Seule une religion qui est une manière de vivre dans toutes les sphères de l'existence mérite ou peut espérer survivre. Car la tâche de la religion est de nous aider à voir le profane comme sacré, le monde comme donné par Dieu. (...) Pareillement, si notre religion est fondamentalement sans rapport avec le politique, alors nous comprenons le politique comme un royaume en dehors du règne de Dieu. Séparer le sacré et le profane, c'est ne reconnaître l'action de Dieu que dans les limites les plus étroites. Une religion qui reconnaît une telle séparation, comme le fait la nôtre, est sur le point de mourir. »
Ce procès de la sécularisation n’est pas sans évoquer celui de Benoît XVI.
MacIntyre, par un christianisme d’abord marxiste (dans les années cinquante) et maintenant thomiste, n’a jamais été étranger aux questions religieuses. Au terme d’une vie d’étude et de réflexion, de quête sincère et exigeante de la vérité, il est intellectuellement persuadé de la supériorité de la tradition morale gréco-chrétienne (Aristote-Platon-saint Augustin-saint Thomas), qui se révèle davantage capable de résoudre les problèmes rationnels que les autres traditions, et parce qu’elle montre mieux leurs limites. Il a vu dans l’encyclique Veritatis Splendor (1993) de Jean Paul II une juste articulation de concepts qu’il n’a jamais cessé de travailler.
La notion catholique de Tradition s’avère parfaitement compatible avec le concept MacIntyrien de tradition. L’insistance sur les récits formateurs a été développée par les théologiens (en particulier son ancien collègue Stanley Hauerwas) qui ont pu aisément montrer le rôle fondateur des grands récits bibliques et évangéliques dans la formation du caractère chrétien. Et c’est dans l'Église, communauté des croyants où l’universel se vit dans le local (la paroisse), par des pratiques et traditions spécifiques, que grandissent les chrétiens et qu’ils exercent leur raison. Au nom d’un aristotélisme parfois qualifié de révolutionnaire et d’un thomisme subversif, MacIntyre a ainsi joué un rôle clé dans l’élaboration de la nouvelle théopolitique chrétienne.
Après un pontificat qui a provoqué de multiples divisions dans l’Église, l’élection de Robert Francis Prevost sur la chaire de Pierre laisse espérer un retour à davantage d’unité.
L’élection rapide et inattendue de Robert Francis Prevost, 69 ans, comme 267e successeur de saint Pierre montre que les cardinaux de sensibilités très diverses ont su se retrouver facilement dans un candidat capable de renforcer l’unité du peuple de Dieu. Le nouveau pape est généralement décrit comme un modéré, avec des positions qui ne s’alignent ni pleinement sur le progressisme ni sur le conservatisme (pour autant que ces catégories soient pertinentes), mais qui varient selon les enjeux. D’un côté, avec une sensibilité pastorale proche de celle du pape François, le prélat américain a montré une attention à la justice sociale, au soutien aux plus pauvres, aux migrants et aux périphéries géographiques et sociales,. Son expérience missionnaire au Pérou (1985-1998, puis évêque de Chiclayo, 2014-2023) et son choix du nom Léon, suggère une référence à Léon XIII (pape de la doctrine sociale avec la grande encyclique Rerum novarum), est peut-être révélateur d’une préoccupation pour les questions politiques et sociales. Sur la terre des Incas, il a déployé non seulement son zèle pastoral mais encore son talent de diplomate, acteur de la paix civile dans un contexte tendu.
Réformateur raisonnable, il devrait prolonger à sa façon le processus synodal. Toutefois, il n’est pas un progressiste : nommé à la tête du dicastère pur les évêques, il a bloqué des initiatives comme le « Conseil synodal » allemand et s’est opposé à l’ordination des femmes diacres lors du synode sur la synodalité, arguant que cela pourrait « cléricaliser » les femmes. Il a également rejeté la proposition de démocratiser le choix des évêques par une consultation des laïcs. Concernant la déclaration Fiducia Supplicans (qui autorise la bénédiction de couples de même sexe), il a prôné une grande latitude pour les conférences épiscopales, certaines d’entre elles (notamment en Afrique) la refusant publiquement. Il a d’ailleurs dénoncé des « croyances et des pratiques qui sont en contradiction avec l’Évangile », tel le « style de vie homosexuel » et les « familles alternatives composées de partenaires de même sexe et de leurs enfants adoptés ». Dans son évêché péruvien, il s’est opposé aux enseignements sur le genre à l’école : « la promotion de l’idéologie du genre est déroutante, car elle cherche à créer des genres qui n’existent pas ».
Le tempérament du nouveau pontife romain est à l’exact opposé de celui de son prédécesseur. Autoritaire, parfois colérique, François se montrait parfois peu soucieux du droit de l’Église, au point que des canonistes ont contesté la validité de certaines de ses décisions (dont le motu proprio Traditionis custodes limitant la messe traditionnelle). La discrétion de Léon XIV s’accompagne d’une grande maîtrise de ses dossiers. Il est docteur en droit canonique à l’Angelicum (Université pontificale Saint-Thomas d’Aquin). Il a un profil de médiateur : sa réputation au Vatican, renforcée par son rôle de préfet du Dicastère pour les évêques (2023-2025), est celle d’un homme d’écoute, aimant travailler en équipe, capable de concilier des points de vue divergents.
Cela le positionne comme un pont entre progressistes et conservateurs, recherchant l’unité de l’Église plutôt qu’une rupture. Ce qui serait conforme à sa devise cardinalice : In Illo uno unum, extraite du commentaire de saint Augustin sur le psaume 127 : sed et nos multi in Illo uno unum, que l’on traduit par « bien que nous soyons nombreux, nous sommes un dans le Christ ».
Un dernier point a été peu relevé par les journalistes. Il s’est présenté comme un augustinien, non seulement en tant que membre (et même prieur général de 2001 à 2013) de l’Ordre de Saint-Augustin, mais aussi en tant que disciple du plus grand docteur de l’Église. Comme Benoît XVI et comme les penseurs postibéraux américains.
Les demandes de baptême d’adolescents et d’adultes ont progressé de 258 % en cinq ans. Pourquoi ?
La récente progression rapide du nombre de catéchumènes n’est plus discutable et elle interroge. Avant de scruter ce phénomène, Jean-Marie Guénois rappelle d’abord la chute des baptêmes de petits enfants : « en l’an 2000, un bébé sur deux était baptisé [400 327] ; en 2024, seul un sur trois l’est [194 223]. Le diocèse Strasbourg illustre ce phénomène. Il est celui qui compte le moins de baptêmes d’adultes en proportion de sa population, car la pratique de baptêmes d’enfants y est encore élevée » (Le Figaro, 11 avril). Mais cette constatation n’explique pas la hausse spectaculaire des baptêmes de jeunes et d’adultes constatée ces dernières années.
Baptême de saint Augustin par saint Ambroise
Le magazine Famille Chrétienne et le site Aleteia ont réalisé une enquête auprès d’environ 900 catéchumènes. Il en ressort que 65 % d’entre eux disent ne pas avoir grandi dans une famille croyante, dont 50 % assurent avoir découvert la foi par eux-mêmes. 22 % se réclament d’une famille ayant une pratique religieuse occasionnelle, et 7 % seulement d’une pratique régulière. Avant d’entrer en catéchuménat, 59 % des catéchumènes avaient déjà lu la Bible, occasionnellement pour 42 % d’entre eux et régulièrement pour 17 %. La liturgie a été un élément notable dans leur conversion : 83 % des catéchumènes se rendaient à la messe avant même d’entamer leur démarche de demande de baptême, 45 % rarement, 38 % régulièrement. Beaucoup ont été attirés vers l’Église grâce aux réseaux sociaux : ils ont joué un rôle important pour 78 % des catéchumènes et ils sont 84 % à suivre des influenceurs chrétiens (Frère Paul-Adrien, Le Catho de service…). Mais le facteur humain n’est pas négligeable : pour 54 %, ce sont un prêtre, un religieux ou un catéchiste qui les ont le plus aidés dans leur parcours de foi et 32 % précisent que leurs amis ont été des aides précieuses dans ce cheminement.
Un problème demeure : comment assurer l'« après-vente » du baptême quand la plupart des néophytes ne demeureraient pas fidèles à leur engagement ? Pour répondre à cette question, les évêques d’Île-de-France ont décidé d’ouvrir un concile provincial sur le thème Catéchumènes et néophytes, de nouvelles perspectives pour la vie de notre Église dans nos diocèses ; sa durée sera d’une année environ et il sera célébré à partir de la Pentecôte 2026 jusqu’à l’été 2027. Selon l’enquête de Famille chrétienne, les catéchumènes désirent un accompagnement sérieux après le baptême, afin d’approfondir les grandes questions sur la foi et la messe et de s’engager dans la vie de l’Église. Ils aspirent à des échanges avec des amis qui partagent leur foi (57 %), à un accompagnement spirituel (22 %), ou à la participation à un groupe de néophytes dans leur paroisse (12 %).
Les chiffres
Voici les principaux résultats d’une enquête sur les catéchumènes baptisés à Pâques diligentée par la Conférence des évêques de France.
10 384 adultes
La tendance à la hausse du nombre de baptêmes d’adultes s’accentue. 10 384 adultes seront baptisés dans la nuit ou le jour de Pâques soit une augmentation de 45 % par rapport à l’année 2024. Cette année, 13 diocèses (soit plus de 10 % de l’ensemble des diocèses de France) ont plus que doublé le nombre d’adultes baptisés. En dix ans, les catéchumènes adultes, en France, sont passés de 3900 (en 2015) à 10 384 (en 2025), soit une augmentation de plus de 60 %.
En 2020, les 26-40 ans représentaient le double des 18-25 ans. En cinq ans seulement, la courbe des 18-25 ans est passée au-dessus de celle des 26-40 ans : ils sont désormais 42 % contre 39 %. Les 41-65 ans sont 18 % et les plus de 65 ans 1 %.
En cohérence avec le rajeunissement des catéchumènes, la part des étudiants (27 %) augmente fortement par rapport aux années passées (ils n’étaient que 17 % il y a 5 ans). Cependant, les catéchumènes de milieux populaires (ouvriers, techniciens et employés) restent toujours importants (36 %). Suivent notamment les enseignants et cadres (13 %) et les professions libérales et indépendantes (8 %).
74 % des catéchumènes habitent en zone urbaine, 26 % en zone rurale.
63 % sont des femmes, 37 % des hommes.
52 % des catéchumènes sont issus de familles dites de tradition chrétienne (celle de la majorité des Français), 4 % de religion musulmane, 37 % sans religion ou sans tradition religieuse connue.
Cette année on enregistre une augmentation de 31 % des accompagnateurs, qui suit la forte augmentation du nombre de catéchumènes. Les laïcs s’impliquent fortement (9804), en collaboration prêtres (1388), les religieux (346) et les diacres (333).
Toutes les provinces ecclésiastiques sont concernées, avec un nombre plus important dans les grandes métropoles : Paris (2652 catéchumènes), Marseille (1104) et Lyon (965)… 9427 confirmands adultes
Les demandes de confirmation d’adultes augmentent de façon très importante depuis deux ans. 9427 adultes ont ainsi reçu ce sacrement en France en 2024 (plus du double par rapport à 2022). S’il existe quelques demandes liées à un appel pour être parrain ou marraine, ou en vue d’un mariage, la majeure partie des confirmands mettent en avant leur quête spirituelle. 7404 adolescents
En 2025, on compte 7404 catéchumènes adolescents (11-17 ans) soit une augmentation de 33 %. Le Frat vient de réunir à Lourdes 13 500 lycéens franciliens, soit 50 % de plus par rapport à la précédente édition de 2023 – un record absolu par rapport au premier pèlerinage (1908).
65 % sont des filles, 35 % des garçons.
Article paru dans Chrétiens dans la Cité n°461 du 28 mars 2025
Selon un rapport du Sénat 2500 et 5000 églises risquent de disparaître d’ici à 2030. Que faire ?
La vente d’églises défraie la chronique. Le diocèse d’Arras a mis l’église Saint-Edouard de Lens sur leboncoin.fr avec cette annonce rédigée par son agence immobilière : « Vends maison 4 pièces 539 m2 - 362 500 €. Église idéalement située d’environ 539 m2 offrant de multiples possibilités. Laissez libre cours à votre imagination pour ce bien très rare à la vente. » De son côté, le diocèse de Nancy et de Toul vient de mettre en vente l’église Notre-Dame-de-Franchepré de Joeuf dont le maire envisage de transformer en musée du football, en hommage à l’enfance de Michel Platini. Sur patrice-besse.com sont actuellement proposées une église néogothique près de Clermont-Ferrand (380 000 €), une ancienne basilique classée Monument historique à 15 mn de Poitiers (950 000 €), sur une île de la Loire une église du 17e siècle également classée (100 000 €), une église du début du 20e siècle dans une ville moyenne de Bretagne (330 000 €), la chapelle de l’ancien carmel de Niort (220 000 €), etc. D’autres églises, invendables car non entretenues par les communes, sont détruites.
Comment sauver nos clochers ? Question posée par France catholique (n°3894 du 21 mars). Les sénateurs proposent de « développer les usages partagés des édifices cultuels » délaissés par les fidèles. Un exemple : datant du XVIIe siècle, l’église Saint-Joseph de Villefranche-sur-Rouergue était fermée depuis vingt ans mais toujours consacrée. En mai 2015, l’association CAP Solidarité (association Culturelle de l’Atelier des Pères) a été créée afin de permettre sa réouverture. En 2019, c’est chose faite et au temps de Noël est installé le Village aveyronnais et sa crèche de 120 santons. Et deux messes y sont célébrées chaque année. Mais encore convient-il que les « usages partagés » soient compatibles avec le culte. L’abbé Renaud Bertrand, responsable de la Commission d’art sacré du diocèse de Luçon explique dans France catholique : « Rien de profane ne peut trouver place dans une église sacrée. L’église est le lieu de rencontre entre Dieu et son peuple. Ce qui pourrait être compatible doit découler de la vie évangélique et rapporter l’homme à Dieu. Par exemple, une exposition d’art sacré peut avoir sa place dans une église, à l’inverse d’une exposition profane. Si nous limitons l’usage de nos églises à la célébration des sacrements et à la prière c »ommunautaire, le risque est grand que de nombreux maires ferment leurs églises, au motif qu’il n’y a plus d’offices. »
La jeune association Les Priants des campagnes œuvre pour mobiliser des groupes de prière pouvant assurer une présence dans les églises. Son prêtre référent, le Père Dominique de Lafforest, explique : « Notre objectif n’est pas ''la défense du patrimoine'', expression devenue banale. Ce que nous voulons c’est une prise de conscience de ce que l’on pourrait appeler ''l’âme'' de nos églises, chapelles, abbatiales, sanctuaires. Ils furent voulus, conçus, construits, entretenus, pour que la prière s’y élève. Les Priants des campagnes n’ont nullement la prétention de se substituer aux agents de l’entretien d’un patrimoine, fût-il qualifié de ''religieux''. Les églises où personne ne prie plus deviennent des musées, des ''coques vides''. En tant que baptisés il nous incombe de ''réveiller'' la foi en nos prières. C’est Jésus qui nous commande de prier en tout temps. En ouvrant des églises désertées, en sonnant les cloches, en faisant monter avec confiance notre prière, si humble qu’elle nous paraisse, nous savons – puisque c’est le Christ qui le dit – que nous contribuons à consoler son peuple désemparé, voire désespéré. L’appel des cloches console les gens, croyants ou pas."
Publié à l'occasion de son 95e anniversaire, un ouvrage collectif (27 auteurs du monde entier) dirigé par Bruno Bérard et Paul Ducay rend hommage au grand philosophe catholique de Nancy : "Jean Borella pour tous. Introduction à son œuvre" (L'Harmattan, 252 p., 27 €).
Ses nombreux ouvrages développent des recherches aussi diverses qu’inédites sur la théorie et l’usage du signe symbolique, le sens du surnaturel, la philosophie de la religion, la théologie et la métaphysique. Un penseur magistral bien que méconnu.