Soloviev, Dieu et César

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Une méditation de Vladimir Soloviev, dans La Russie et l’Église universelle :

"L'humanité a cru qu'en professant la divinité du Christ elle était dispensée de prendre au sérieux ses paroles. On a arrangé certains textes évangéliques de manière à en tirer tout ce qu'on voulait, et on a fait la conspiration du silence contre d'autres textes qui ne prêtaient pas aux arrangements. On répétait sans cesse le commandement : «Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu » — Pour sanctionner un ordre de choses qui donnait à César tout, et à Dieu — rien. Par la parole : «Mon Royaume n'est pas de ce monde», on tâchait de justifier et de confirmer le caractère païen de notre vie sociale et politique — comme si la société chrétienne dût fatalement appartenir à ce monde, et non pas au Royaume du Christ. Quant aux paroles : « Tout pouvoir m'est donné dans les cieux et sur la terre » — on ne les citait pas. On acceptait le Christ comme sacrificateur et comme victime expiatoire, mais on ne voulait pas de Christ-Roi. Sa dignité royale fut remplacée par toutes les tyrannies païennes, et des peuples chrétiens ont répété le cri de la plèbe juive : « Nous n'avons pas d'autre Roi que César! » Ainsi l'histoire a vu et nous voyons encore le phénomène étrange d'une société qui professe le christianisme comme sa religion et qui reste païenne — non pas dans sa vie seulement, mais quant à la loi de sa vie."

Soloviev, Dieu et César
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