Les conservateurs d'un avenir en marche
Analyse du Père Bernard Devert, fondateur d'Habitat et Humanisme :
Les manifestants du 13 janvier ou des conservateurs d’un avenir en marche
L’enfant n’est pas un droit, il est un don ; il a fallu des siècles pour que les hommes comprennent qu’ils n’avaient pas tous les droits sur leurs enfants. Abraham lui-même a dû arrêter son bras meurtrier, apprenant qu’Isaac avait un autre Père.
L’enfant-roi, l’enfant pour moi, ne serait-il pas le signe d’une civilisation qui s’inscrit dans la puissance jusqu’à considérer que ne pas posséder un enfant est une discrimination et une injustice.
Le raz de marée de ce dimanche vient dire « stop » à une telle approche. Le possible de l’avenir devrait-il surgir seulement de ce que nous décidons. Une société qui n’offre pas l’hospitalité à la différence ne porte-t-elle pas en germe les traces de l’hostilité, laquelle n’est elle pas déjà prégnante lorsque les Pouvoirs Publics n’entendent pas la parole de ceux qui se sont déplacés le 13 janvier.
Cette manifestation n’est pas que « consistante » selon l’expression « à minima » de l’Elysée. Il serait sage qu’elle soit être reconnue pour ce qu’elle est : un appel serein, espérant, déterminé pour une législation ouverte et raisonnable sur un fond de relation respectueuse, aux antipodes de ces affirmations péremptoires du droit à l’enfant et du refus de la différence.
Acceptons qu’il y ait des voies différentes appelant le respect des homosexuels comme des hétérosexuels, des croyants et des non croyants, des blancs et des noirs, dans cette conviction que nous formons une famille humaine mais ne brouillons pas à plaisir le chemin.
Soyons aussi attentifs à ces enfants qui souffrent, se rappelant qu’un sur cinq est victime du mal logement.
Que de drames comme celui de cette maman et son enfant qui ont vécu un temps d’enfer pour avoir connu la rue, la promiscuité avec la misère laissant bien des séquelles. Elles ont pu être accueillies au bout d’un an dans un immeuble situé dans un quartier les éloignant des stigmatisations de la souffrance sociale. Alyssa, 9 ans, a retrouvé un équilibre psychique. Avec une maturité qu’accélèrent les épreuves, elle exprime sa joie d’avoir une chambre pour elle. L’accompagnement réservé à sa maman offre à ce foyer une sécurité transformatrice des relations.
L’enfant n’est pas un droit mais il a droit à toute notre attention, à cette tendresse que seul autorise un chez-soi décent.
Un père, une mère, c’est élémentaire exprimaient fort justement les manifestants, tout comme le logement est un droit élémentaire.
Il est de ces avancées qui ne se trouvent pas seulement dans la revendication du ‘je veux’ ou ‘j’exige’ mais à partir d’une prise de conscience invitant à devenir moins solitaires pour être plus solidaires d’un monde à humaniser, là où les obligations l’emportent sur les droits, là où l’autrement n’est ni jugé ni banalisé.
Bernard Devert