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Humble discrétion

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Dans sa tribune publiée par Le Monde (9/12), Nicolas Sarkozy demande aux croyants de pratiquer leur culte avec une « humble discrétion ». Voici quelques réactions... parmi beaucoup d'autres.

 

La phrase exacte est la suivante : « Chrétien, juif ou musulman, homme de foi, quelle que soit sa foi, croyant, quelle que soit sa croyance, chacun doit savoir se garder de toute ostentation et de toute provocation et, conscient de la chance qu'il a de vivre sur une terre de liberté, doit pratiquer son culte avec l'humble discrétion qui témoigne non de la tiédeur de ses convictions mais du respect fraternel qu'il éprouve vis-à-vis de celui qui ne pense pas comme lui, avec lequel il veut vivre. »

Venant après un développement sur l'islam, elle a suscité cette réaction du jésuite Pierre de Charentenay, rédacteur en chef de la revue Études : « Comment les musulmans de France ne ressentiraient-ils pas ces propos comme la stigmatisation de leur religion ! » Sur son bloc (ou blog), un internaute lui a fait remarquer que chrétiens et juifs étaient autant visés.

Ce que relève à son tour le journaliste René Poujol (Pèlerin), notant que les propos de Sarkozy « confortent l’idée d’une privatisation de la pratique religieuse, déjà bien présente dans une certaine conception de la laïcité à la Française. (...) Au nom de l’égalité entre les religions et du respect dû à l’incroyance, verra-t-on demain, des tribunaux interdire les sonneries de cloches au motif qu’il s’agit-là d’un appel 'ostensible' à la prière, contraire à la laïcité ? »

Isabelle de Gaulmyn (La Croix) ajoute : « Encore une fois, on tente de réduire le phénomène religieux a quelque chose de purement privé, à son unique dimension de conviction, oubliant que la religion est aussi un fait collectif, et qui s’inscrit dans la société… Les cathédrales, la basilique Montmartre ou les JMJ, sont-elles vraiment humbles et discrètes ? Demander aux religions de rester « humbles et discrètes » est un non-sens. Cela renoue avec une certaine tradition française laïciste que l’on croyait avoir dépassé. C’est aussi dangereux, car vouloir nier le religieux est la meilleure manière d’encourager ses manifestations les plus radicales. » Sur le site Rue89.com, un anonyme écrit : « si l'abbé Pierre et Sœur Emmanuelle étaient encore parmi nous, on les inviterait à faire moins de bruit.»

 

La formule est révélatrice de la conception moderne de la religion : une croyance intime que l'Etat prétendument neutre et pacifique doit savoir cantonner dans le domaine privé. Là-dessus, il est urgent de lire la puissante analyse de William Cavanaugh dans son dernier livre, Le Mythe de la violence religieuse (Ed. de L'Homme Nouveau). Il montre comment le pouvoir étatique moderne a créé ce mythe pour marginaliser « l'autre » religieux, contrastant avec le sujet séculier, rationnel et pacifique. Après avoir organisé ce que certains appellent « la captivité politique de l'Église dans la Babylone moderne », le mythe justifie aujourd'hui la guerre contre les sociétés musulmanes. Ce qui obscurcit par là-même notre compréhension de ce que l'islam peut réellement avoir de dangereux.

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France, terre de mission

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Confrontée à la chute rapide du nombre de prêtres, les évêques français expérimentent de nouveaux modes d'organisation pastorale.

 

Lors de leur dernière assemblée de Lourdes, les évêques ont réfléchi sur les réponses à apporter au problème désormais dramatique de la raréfaction des prêtres diocésains : ils ne sont plus que 7500 en activité, avec un âge moyen de 58 ans (ou 73 ans en incluant les 7500 autres prêtres retraités, dont beaucoup sont d'ailleurs encore actifs). Même à Paris, qui avait connu un fort rajeunissement de son clergé sous l'épiscopat du cardinal Lustiger, la chute est préoccupante : seulement une cinquantaine de séminaristes, 7 ordinations prévues en 2010 et 4 en 2011 (contre 19 en 1993). Un certain nombre de diocèses ruraux auront bientôt la taille des grosses paroisses d'antan, avec moins de dix prêtres.

Face à la pénurie, plusieurs modèles d'organisation (parfois combinés) sont actuellement expérimentés :

Le regroupement de paroisses. Cette solution qui a prévalu a vite montré ses limites. Un prêtre peut-il s'occuper de 60 clochers, comme dans le diocèse de Langres ? Le diocèse d'Agen est passé en dix ans de 420 à 26 paroisses mais dans cinq ans, il n'y aura plus 26 prêtres.

Le recrutement massif de diacres. Le diocèse de Saint-Dié (Vosges), qui n'a aucun séminariste et dont la dernière ordination remonte à 2003, a lancé une campagne de recrutement de diacres permanents. Les responsables pastoraux ont repéré 70 candidats (hommes mariés, âgés entre 35 et 55 ans) et l'évêque proposera cette mission à 30 d'entre eux.

Le recours aux laïcs. Il est institutionnalisé sous diverses formes dans plusieurs diocèses (Poitiers, Créteil, Tulle, Châlons-en-Champagne...). Des laïcs bénévoles ou salariés sont chargés de responsabilités pastorales, les prêtres venant pour administrer les sacrements. Plus largement, on estime que 500 000 laïcs sont actifs dans les paroisses. Mais ce vivier tend aussi à s'épuiser.

L'appel aux prêtres étrangers, souvent africains, parfois asiatiques. Une forme d'« immigration choisie » qui n'est pas inépuisable : l'Église d'Afrique a également besoin de pasteurs.

L'appel aux communautés nouvelles et traditionnelles. Un choix fait par le diocèse de Fréjus-Toulon, d'abord par Mgr Madec puis par Mgr Rey, et qui a permis d'éviter le regroupement des paroisses. Son séminaire compte 80 séminaristes. D'autres diocèses emboitent le pas (Avignon).

La création de pôles missionnaires. Proposition exposée à Lourdes par Mgr Lebrun : abandonner le maillage territorial et créer des pôles missionnaires autour de prêtres vivant en communauté. Des équipes itinérantes composées de prêtres, religieux et laïcs mèneraient des missions d'évangélisation auprès de communautés de base animées par des laïcs.


Il faut enfin noter que la proportion des vocations destinées à la forme extraordinaire du rite romain ne cesse de croître, atteignant aujourd'hui le quart des vocations totales.

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Téléthon : un bref argumentaire

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Le 23e Téléthon aura lieu les 4 et 5 décembre. La collecte précédente, en décembre 2008, a rapporté 105 millions d'euros à son organisateur, l'Association française contre les myopathies (AFM). Rappelons les principaux griefs adressés par les catholiques :

1/ L'utilisation des embryons pour la recherche. Le Téléthon finance le premier centre français de recherches sur l'embryon humain : l'Institut I-STEM, dirigé par le Dr Marc Peschanski. Rappelons que la recherche sur les embryons humains ne vise pas guérir des embryons malades, consiste à prélever des cellules de l'embryon (que l'on détruit) pour les utiliser comme matériau de recherche.

2/ La sélection des embryons sur critères génétiques : le diagnostic pré-implantatoire (DPI), dont l'AFM est l'un des principaux promoteurs. Quand un couple est porteur d'une maladie génétique, on lui propose de faire une fécondation in vitro, puis de rechercher sur les embryons obtenus ceux qui sont porteurs de la maladie et ceux qui ne le sont pas, les bébéthons. Seul l’embryon qui n'est pas porteur de la maladie est réimplanté, ses frères et soeurs sont tués.

3/ La recherche qui utilise des fœtus avortés. Des travaux sur les maladies de Parkinson et de Huntington entraînent des greffes de cellules neurales extraites de fœtus avortés. Il faut utiliser de 3 à 10 fœtus pour un patient et il s'agit de fœtus dont les cellules neurales ne sont pas encore mortes pour que la greffe réussisse.

Ajoutons que l'AFM n'hésite pas à déclencher des procès contre ceux qui dénoncent ces pratiques moralement condamnables.

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Le Dpi, une transgression éthique grave

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Dans un avis, le Comité consultatif national d’éthique a ouvert la possibilité du dépistage de la trisomie 21 lors du diagnostic pré-implantatoire (DPI).

Dans un communiqué intitulé Vers une utilisation eugénique du diagnostic pré-implantatoire, le cardinal André Vingt-Trois a déclaré : « Le DPI constitue une transgression éthique grave puisqu’il vise à éliminer des embryons non-conformes. Cette transgression a été acceptée par le législateur, en l’encadrant strictement pour la seule détection de maladies génétiques d’une « particulière gravité », reconnues incurables au moment du diagnostic. Le fait d’élargir cette recherche à la trisomie 21 constitue un pas supplémentaire vers une utilisation eugénique du DPI. Rien n’empêchera de l’étendre demain à la recherche d’autres affections, voire à la satisfaction de désirs personnels. C’est un signal extrêmement négatif adressé aux personnes atteintes de la trisomie 21 et à leurs familles. Sans cacher les difficultés rencontrées par les personnes trisomiques, il faut rappeler qu’il ne s’agit pas d’une anomalie mortelle. Ne sommes-nous pas devant un refus insidieux de nos sociétés modernes de l’accueil des personnes handicapées?»

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Entretien avec François Huguenin

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Denis Sureau s'entretiendra avec François Huguenin,
auteur de Résister au libéralisme. Les penseurs de la communauté
dans son émission dominicale sur Lumière de l'Espérance,
a radio du dimanche de Radio courtoisie
Dimanche 15 novembre
à 12h, 16h et minuit.


Paris 95.,6 MHz - Caen 100,6 MHz - Chartres 104,5 MHz - Cherbourg 87,8 MHz -
Le Havre 101,1 MHz - Le Mans 98,8 MHz
Pour toute la France, en clair, sur le bouquet CanalSat
Pour le monde entier sur www.radiocourtoisie.net
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Le geste des prêtres lyonnais

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Le conseil du presbyterium de Lyon, instance représentative des prêtres du diocèse, invite chacun d’entre eux à donner un mois de leur salaire à une association caritative soutenant les victimes de la crise. La somme proposée est de 900 euros mais « chacun donne ce qu’il veut et ce qu’il peut ». Dans une lettre adressée aux prêtres, le conseil précise :

« Cet acte communautaire de solidarité n’appelle pas de publicité particulière, mais il ne veut pas rester secret non plus, pour qu’aux yeux des chrétiens ce geste de partage ait valeur d’encouragement. Cette proposition, faite par un jeune prêtre du diocèse, reprend pour l’essentiel une action de solidarité financière organisée par les prêtres d’un diocèse espagnol. »

Par ce geste qui se réfère notamment à l'encyclique sociale de Benoît XVI Caritas in veritate, les prêtres de Lyon veulent montrer que l'Église ne se contente pas de parler mais agit et veut inciter tous les chrétiens à agir à leur tour.

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Retour à la maison

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Le retour de groupes entiers d'anglicans dans l'Église catholique romaine constitue un événement de première importance dans l'histoire de l'oecuménisme et du pontificat de Benoît XVI.

 

Bien qu'attendue depuis plusieurs mois, l'annonce de la publication d'une constitution apostolique permettant la réintégration de pans entiers issus de la Communion anglicane est un acte historique considérable. Contrairement à certains commentaires journalistiques hâtifs, le dispositif ne concerne pas seulement la Traditional Anglican Communion avec ses 400 000 fidèles et sa trentaine d'évêques, mais le mouvement Forward in Faith et tous les diocèses et paroisses anglicans intéressés, soit un potentiel de milliers de prêtres et de millions de fidèles à travers le monde. L'originalité du dispositif romain tient à la création d'ordinariats (diocèses) personnels, avec leur propre tradition et leur liturgie, à l'instar des catholiques de rit oriental. Rome n'a cependant pas cédé sur l'invalidité des ordinations anglicanes affirmée par Léon XIII en 1896 : les « prêtres » anglicans devront être ordonnés pour continuer leur ministère.

 

Pour le grand théologien anglo-catholique John Milbank, à l'origine du courant Radical Orthodoxy, cette initiative de Benoît XVI est remarquable pour quatre raisons (cf. L'Avvenire, 30/10). Premièrement, Rome reconnaît une certaine valeur à la tradition anglicane. Il est en effet prévu de conserver ce que le patrimoine liturgique et spirituel anglican a de bon. Deuxièmement, l'Eglise romaine montre qu'elle reconnaît que le catholicisme ne peut être réellement s'exprimer que dans la diversité culturelle. Troisièmement, elle accepte la possibilité d'un clergé marié comme elle le fait déjà pour les catholiques orientaux et certaines paroisses ex-anglicanes américaines. (Cependant, si les prêtres anglicans mariés pourront être admis au ministère sacerdotal dans l'Église, cette disposition ne s'appliquera ni aux évêques ni aux futurs séminaristes.) Quatrièmement, Benoît XVI prouve qu'il est aujourd'hui possible de réunir les chrétiens sous l'autorité du pape. La proposition de Benoît XVI constitue ainsi un acte oecuménique majeur dans l'histoire de l'oecuménisme catholique – un oecuménisme par le haut, qui vise l'unité de l'Église, et non « l'oecuménisme fondé sur un dialogue d'égal à égal » encore défendu par un Hans Küng (cf. Le Monde, 28/10). Les prochaines étapes annoncées sont, à court terme, la réintégration de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X et, à plus long terme, le rapprochement avec une partie de l'Orthodoxie (notamment russe).

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Au sujet d'Orange stressé

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Suite à la multiplication des suicides à France Telecom, le Père Bernard Podvin, porte-parole de la Conférence des évêques de France, a publié une déclaration intitulée Suicides au travail. Il s'interroge : « Qu'est donc cet économisme, faisant pression sur l'homme, au point de ne plus lui donner d'entrevoir une autre issue que de mettre fin à ses jours ? » Rappelant que le travail humain est une dimension fondamentale pour l'épanouissement et le bien commun, il ajoute : « Il est urgent que les acteurs, concernés par ce grave enjeu de société, se concertent afin d'endiguer ce désespoir devant lequel nul ne peut se résigner. Certaines pratiques managériales sont à revoir. La vie est un don et a une valeur inestimable. Une société qui ne procure plus de travail, ou qui en impose dans des conditions inacceptables, n'est plus digne d'elle-même. » Le texte du Père Podvin s'achève sur un extrait de l'encyclique Caritas in Veritate de Benoît XVI : « Des relations authentiquement humaines, d'amitié et de socialité, de solidarité et de réciprocité, peuvent également être vécues, même au sein de l'activité économique, et pas seulement en dehors d'elle ou après elle. »

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Résister au libéralisme

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Où en est la philosophie politique en ce XXIe siècle naissant ? On trouvera une réponse riche et solidement argumentée dans le nouvel essai de François Huguenin. Il montre que le libéralisme dominant est attaqué, après l'échec du marxisme, par trois courants ou plutôt catégories de penseurs: l

1) Les philosophes communautariens qui opposent la communauté à l'individualisme libéral représenté par un John Rawls (qui fait l'objet d'une étude rigoureuse) : Sandel, Taylor, Walzer et MacIntyre.

2) Les néo-républicains qui veulent corriger la modernité, tels que Pocock, Quentin Skinner et Pettit.

3) Enfin la nouvelle théologie politique avec Hauerwas, Cavanaugh, Milbank et Pickstock. Plutôt que s'attacher à la pensée de chacun, François Huguenin montre leur apport à partir de grands thèmes: redécouvrir la communauté, revisiter l'histoire, relire la théologie et repenser le politique. Il s'emploie avec talent à déceler les failles ou à révéler la fécondité d'approches qui renouvellent en profondeur notre vision de l'homme dans la Cité. Passionnant!

 

François Huguenin

Résister au libéralisme

Les penseurs de la communauté

CNRS Editions, 256 p., 25 €

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