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Lorsque la démocratie devient totalitaire

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Avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, brillant écrivain catholique (L’Infortune, Inigo…) et chroniqueur inspiré dans La Croix, Me François Sureau a plaidé à trois reprises

devant le Conseil constitutionnel la non-conformité à la Constitution de 1958 de trois dispositions législatives relatives à l’état d’urgence. Les textes de ces plaidoiries viennent d’être publiés sous la forme d’un petit livre implacable, d’une rare élégance de pensée et de style : Pour la liberté (Tallandier, 80 p., 7,90 €).

La première affaire concernait la création d’un délit consultation habituelle de sites internet terroristes – une mesure évidemment contraire à la liberté de communication, retoquée par le Conseil, puis réintroduite par les députés dans le Code pénal.

La deuxième visait « le fait de préparer la commission de l’infraction » avec « l’intention » de passer à l’acte – notions dangereusement floues. François Sureau souligne que même l’Inquisition n’est pas allée aussi loin.

La troisième disposition permettrait au préfet « d’interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne cherchant à entraver, de quelque manière que ce soit, l’action des pouvoirs publics » – restriction de la « liberté d’aller et venir » qui, prise contre le péril islamiste, a été aussitôt appliquée… aux écologistes pendant la COP 21 et à des Corses susceptibles de troubler un match de football ! Où l’on comprend que l’appareil répressif d’État peut tout autant être utilisé pour de nouvelles persécutions, y compris antichrétiennes.

Et c’est ce qu’a déploré Mgr Georges Pontier, archevêque de Marseille, président de la Conférence des évêques de France, dans une lettre adressée le 6 juillet à Gérard Collomb, ministre de l’Intérieur, au sujet de projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme. Ce texte prévoyait la fermeture des lieux de culte dans lesquels seraient tenus des propos pouvant inciter à la violence. On devine l’intention sous-jacente : la fermeture des mosquées salafistes. Or les prédicateurs subversifs peuvent déjà punis (art. 35 de la loi du 9 décembre 1905), « sans pour autant faire obstacle au libre exercice du culte par les fidèles », note Mgr  Pontier, qui s’interroge sur les modalités d’appréciation des propos incriminés et conclut que ces nouvelles mesures « sont d’application générale, et constituent un recul de la liberté de religion dans notre pays. »

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Au sommaire du numéro 351

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Le 351e numéro de la lettre d'information Chrétiens dans la Cité vient de paraître. Abonnez-vous en profitant de l'offre découverte à 30 euros seulement pour un an.

Chrétiens dans la cité 351

Au sommaire :

ANALYSE : La politique comme service selon le pape François

AGENDA

LES HOMMES : Mgr Nicolas Souchu - P. Bernard Devert

INFOS : Journée Humanae Vitae - La Nuit du bien commun - Des diocèses contre le Téléthon - Cruxophobie : la croix du cimetière - Jésus en kiosque - Dorothy à Ménilmontant - Dialogue interconfessionnel - La Croix hebdomadaire - Misels au choix

LECTURES : Christophe Dickès, L'héritage de Benoît XVI (Tallandier)

INITIATIVES : Alliance Vita

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Un haut fonctionnaire fait son coming out catho

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Faire son coming out – c’est-à-dire révéler son homosexualité – a été longtemps difficile. Aujourd’hui, s’affirmer catholique et témoigner de sa foi suppose souvent une certaine force d’âme.

Ancien officier de marine et juriste, haut fonctionnaire (Conseil d’État), Christophe Eoche-Duval déclare publiquement sa foi. Dans son essai Vous serez dans la joie ! (Artège, 336 p., 15,90 €), Il refuse avec énergie d’être de ces « chrétiens Alka-Seltzer » dont la dissolution dans le monde conduit inéluctablement à leur disparition. Mais il l’a pourtant été jusqu’à ce que le mouvement social contre le mariage homosexuel contribue à sa prise de conscience. Une autre expérience a compté pour lui : la réalisation d’un spectacle vivant, joué en juillet 2016, Yeshua, reconstituant les noces de Cana. 
Il avait monté des spectacles historiques, mais c’était le premier à dimension évangélisatrice. Il en a tiré la conviction que les chrétiens peuvent et doivent braver, de manière décomplexée, un monde « presque redevenu païen » (on peut dire aussi : le Système). La réévangélisation prendra peut-être trois siècles (le temps qu’il a fallu à l’Église d’en finir avec les persécutions de l’Empire romain), mais cela ne doit pas nous décourager. C’est à une dissidence joyeuse mais lucide que nous invite Christophe Eoche-Duval.

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Séminaristes : - 30% depuis 2000

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Lors de leur assemblée plénière à Lourdes, les évêques ont réfléchi sur la formation des prêtres. A cette occasion, ils ont pris connaissance des dernières données statistiques, peu réjouissantes. Les ordinations sont passées de 142 en 2000 à 60 aujourd’hui.

Le nombre de séminaristes a chuté de 30 % en seize ans : 976 en 2000 contre 662 en 2016. Il n’y a eu que 165 entrées cette même année, avec une baisse régulière pour les Français (111 cette année), plus 46 pour les séminaristes venus d’ailleurs – aujourd’hui, 25 % des séminaristes proviennent d’autres pays que la France. Le séminaire de la Communauté Saint-Martin forme un séminariste sur six : 18 en 2000, ils étaient 109 en 2016. La moitié des séminaristes diocésains sont dans cinq séminaires :  Fréjus-Toulon, Toulouse, Issy-les-Moulineaux, Rennes et Paris. La France compte 32 séminaires et maisons de formation, auxquels s’ajoutent trois maisons à Bruxelles et le Séminaire français de Rome. La fermeture de certains d’entre eux est inéluctable, Rome demandant que chacun d'entre eux compte au minimum 20 séminaristes.

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Menace sur l'actionnariat solidaire : réaction du P. Bernard Devert (Habitat et Humanisme)

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L’Assemblée nationale, lors de la lecture publique du projet de loi de finances 2018, n’a pas validé le maintien des réductions d’impôts liées à l’actionnariat solidaire sur l’IFI (Impôt sur la fortune immobilière, qui remplace l'ISF). En ce jour d'ouverture de la semaine de la Finance solidaire, comment ne pas s'inquiéter du projet de la loi de finance, annonçant un divorce entre fiscalité et solidarité ? Le Père Bernard Devert le président fondateur d'Habitat et Humanisme a réagi par cette chronique :

En terminer avec des mots qui desservent les plus fragiles

Depuis des années, nous récusons l’expression dommageable de ‘niche fiscale’. Les gouvernements successifs n’ont pas saisi - mais sans doute ne sommes-nous pas parvenus à nous faire entendre - que ce qu’ils appellent ’niche’ est souvent un espace précieux de générosité pour lutter contre les situations de misère et de pauvreté. 

P. Bernard Devert

Cette expression fait naître en moi une colère – j’espère qu’elle est juste – Que trouve-t-on dans ces niches ? Non des chiens qui aboient, mais des personnes aux abois qui ne disent rien, brisées par la grande précarité, jusqu’à connaître la honte d’être pauvres. 

Un comble, les oubliés de la Société se terrent jusqu’à ne point solliciter les aides auxquelles ils ont droit. Le non recours aux prestations qui leur sont ouvertes représente plus de 10 milliards d’euros. Ce constat, mis en exergue par ATD Quart-Monde, doit mettre un terme immédiat aux clichés mensongers présentant les pauvres comme des profiteurs. 

Assez de ces vilénies colportées qui tentent d’enlever à ceux qui n’ont rien leur dernière richesse : l’estime de soi. Que leur reste-t-il alors ? Ne nous étonnons pas de ces suicides physiques ou psychologiques, ou encore de ces foyers détruits, non seulement pour des raisons de ressources, mais de par ces jugements qui disqualifient, armant les regards qui assassinent considération et respect. 

Agir pour refuser l’inacceptable n’est pas une option, mais une obligation. La finance solidaire en offre la possibilité pour être le carburant d’une économie attentive aux situations de fragilité. Les règlementations qui s’annoncent risquent de le tarir pour privilégier d’autres ressources concourant à la financiarisation d’une économie asséchant le réel au profit du virtuel. 

Les parlementaires sont alertés, mais, au nom des équilibres budgétaires, que d’inerties laissent nos concitoyens en situation de déséquilibre, d’où des ruptures qui coûtent cher à la Société. L’heure est enfin de comprendre l’urgence de prévenir, plutôt que d’attendre l’irréparable outrage pour intervenir. 

Cette épargne solidaire, même si elle a considérablement progressé en quelques années, demeure très ténue en comparaison de la masse monétaire pléthorique privilégiant des intérêts négatifs aux investissements solidaires qui pourtant garantissent le capital en créant ces biens primaires qui manquent cruellement, l’emploi et le logement.

Terrible cette addiction à la course folle de la puissance qui a pour conséquences la globalisation des marchés et la création de méga entreprises qui ne sont pas sans susciter des déséquilibres entre les multinationales et les Etats. 

Les quatre premières capitalisations de Wall Street représentent plus de 2680 Mds$, soit plus de 40% du PIB de la France. 

Face à tous les Goliath qui surplombent de leur superbe, le Livre de l’humanité rappelle qu’il y a des David qui ne comptent apparemment pour rien, jugés trop faibles, trop vulnérables. Seulement, leur intelligence inventive confère à la fragilité une vision qui n’est pas sans donner sens à la vie pour comprendre que, seul, l’amour protège et construit. 

N’abandonnez pas votre engagement pour une nouvelle économie dont l’objectif est d’inverser les valeurs : une préférence à l’homme, à tous les hommes plutôt que de servir les puissances idolâtres aveuglées par ce qu’elles ont et veulent avoir encore. 

Certes nous sommes des nains par la taille, mais la finalité qui nous porte est si grande et si créatrice d’espérance que nous ne saurions sombrer dans un pessimisme délétère. Ensemble, demeurons les pionniers de cette économie solidaire ; elle concourt au refus de la misère, témoignant d’un combat contre l’indifférence à l’aujourd’hui de ces femmes, hommes et enfants perdus, sans avenir. 

Laissez-moi vous partager cette belle expression de l’économiste Jean Boissonnat : « à force d’imaginer le bien, on finit par y contribuer ». 

Bernard Devert
Novembre 2017

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Au sommaire du numéro 350

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Le 350e numéro de la lettre d'information Chrétiens dans la Cité vient de paraître, avec au sommaire :

ANALYSE : L'affaire de Ploërmel

AGENDA

LES HOMMES : Saint Ex & Stan Rougier - Christine Boutin - Emmanuel Faber

INFOS

Les chrétiens de gauche en ébullition

Un projet de centre médical éthique à Lyon

Chute des entrées dans les séminaires

La responsabilité éthique de la foi

Première Université de la diaconie

Féminisme intégral

Veillées pour la vie

Pros chantants

LECTURES : Histoire incorrecte de l'école, par Virginie Subias Konofal

INITIATIVES : Les organisations protestantes

Pour recevoir ce numéro... et 15 autres, abonnez-vous pour seulement 30 euros !

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Si je t'oublie, Jérusalem

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Si je t'oublie, Jérusalem, que ma droite se dessèche (Ps 137,5). Les paroles du Psalmiste sont plus actuelles que jamais. 
La décision irresponsable prise par Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale de l'État d'Israël s'explique par des motifs de basse politique : alors que le président américain est largement contesté dans son pays, il ménage ses soutiens de la droite évangélique et surtout du lobby sioniste. « La reconnaissance de Jérusalem comme capitale d'Israël satisfait également des supporteurs influents de l'État israélien comme le milliardaire américain d'origine juive Sheldon Adelson, qui a contribué au financement de la campagne électorale de Donald Trump avec un don de 25 millions de dollars (soit environ 21 millions d'euros), et Morton Klein, président de la Zionist Organization of America, la plus ancienne organisation pro-israélienne américaine » (François d'Alançon, La Croix, 7/12/2017)
Un nouvel embrasement de la Terre Sainte ne peut laisser les chrétiens indifférents. Or ce drame ne semble pas émouvoir beaucoup les Occidentaux, qui regardent le nouveau cycle des violences comme une fatalité. Cette attitude s'explique en partie par une méconnaissance des tenants et aboutissements du dossier. Pour comprendre la situation, un rappel historique s'impose. 

Petit rappel historique

A l'origine du conflit, il y a une terre que deux peuples – juif, palestinien – se disputent. Pendant des siècles, leur cohabitation ne pose pas de problèmes majeurs. L'équilibre devient instable lorsque, animés par l'idéologie sioniste puis persécutés en Europe, les Juifs affluent de tous pays. De 60 000 en 1916, ils passent à 500 000 vingt ans plus tard. Le IIIe Reich favorise d'ailleurs l'émigration des Juifs allemands, heureux à la fois de se délester d'un peuple non conforme aux canons de la race aryenne et d'embarrasser les Anglais alors en charge de la Palestine. Après plusieurs années de terrorisme anti-anglais, et sous la pression efficace des groupes juifs internationaux (surtout américains) sachant utiliser le drame de l'holocauste au profit de la cause sioniste, l'Etat d'Israël est proclamé le 14 mai 1948. Les Etats membres de la Ligue arabe déclenchent aussitôt une guerre… qu'ils perdent lamentablement, comme ils perdront les suivantes. 
Les vainqueurs annexent de nouveaux territoires et commencent à chasser les Palestiniens de leurs villages et de leurs villes, à mettre la main sur leurs terres et leurs propriétés. Les groupes terroristes sionistes (Irgoun, Stern… ) n'hésitent pas à exterminer la population de villages entiers, tel celui de Dair Yassin (350 morts, principalement des enfants, des femmes et des vieillards). Objectif : créer un climat de terreur incitant les Arabes à partir. Après leur expulsion, plusieurs centaines de villages (dont des villages chrétiens) sont entièrement rasés (cimetières inclus) afin de propager le mythe d'une Palestine déserte et inexploitée avant l'arrivée des colons juifs.
Rappelons que le mouvement sioniste, fondé par Theodor Herzl en 1896, visait à faire de la Palestine une patrie pour les seuls Juifs. Ben Gourion, premier Premier Ministre d'Israël, déclarait en 1937 que la Palestine n'appartenait pas à ses habitants d'alors, et que ce pays devait résoudre non pas le problème de deux nations, mais d'une seule nation, les Juifs de partout. 
Au total, 900 000 Palestiniens sont expulsés. Les uns se replient sur des lambeaux de territoires (bande de Gaza, Jérusalem-Est et Cisjordanie), dans des camps sordides sous contrôle militaire et administration israélienne. Les autres choisissent l'exil. Pour ceux qui ne se résignent pas, reste la solution des faibles : le terrorisme. Les attentats se succèdent, créant une véritable psychose sécuritaire chez nombre d'Israéliens. La peur d'être "rejeté à la mer" explique la brutalité de leurs réactions. Cerné par des pays arabes hostiles, agressé par les Palestiniens, Israël se sent menacé en permanence.
Fondée en 1964 et bientôt présidée par Yasser Arafat, l'Organisation pour la libération de la Palestine structure la résistance et mène une action politique et diplomatique. L'OLP est aussitôt reconnue par l'Onu. Après une série de péripéties, d'événements et de drames, un accord historique est signé en 1993, après la reconnaissance réciproque entre Israël et l'OLP. Les dirigeants palestiniens acceptent enfin l'existence de l'Etat d'Israël. Le premier ministre israélien, Itzhak Rabin (qui sera assassiné en 1995 par un Juif extrémiste) et Yasser Arafat, signent la "déclaration de principes sur les arrangements intérimaires d'autonomie" qui prévoit la mise en place d'une Autorité palestinienne intérimaire autonome pour une période transitoire ne devant pas excéder cinq ans dans l'attente d'un règlement final et l'institution d'un Etat palestinien. Dans la foulée de l'accord, le Saint-Siège reconnaît à son tour l'Etat d'Israël et, simultanément, noue des relations officielles avec l'OLP (dont le premier représentant est d'ailleurs un catholique, Afif Safieh).
Ces accords dits d'Oslo laissent entrevoir un retour à la paix. Mais avec l'arrivée au pouvoir de Benyamin Netanyahu, partisan d'une ligne dure, les Israéliens font traîner la suite du "processus de paix", accélèrent la colonisation des territoires (le nombre des colons double : ils sont actuellement 250 000), diffèrent à toujours plus tard la reconnaissance de l'Etat palestinien. Il suffit de la provocation d'Ariel Sharon sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem, troisième lieu saint de l'islam, le 28 septembre 2000, pour que la violence éclate à nouveau. Et la victoire électorale de ce dernier aggrave la situation, attisant le feu inextinguible de la haine.
La violence a pour effet de renforcer les extrêmes des deux camps : du côté palestinien, les groupes islamistes (Hamas, Hezbollah, Djihad islamique… ) au détriment de l'autorité de Yasser Arafat ; du côté israélien, le Likoud, les partis religieux et les partisans du Grand Israël s'étendant à la Palestine arabe, au détriment des Travaillistes, généralement plus pacifiques. Extrêmement morcelée, l'opinion publique israélienne oscille entre désir de paix et souci de sécurité. Les actions terroristes provoqués par de jeunes Arabes manipulés par les islamistes ont eu pour effet à différentes reprises de la faire basculer dans le camp des faucons : "on ne peut pas faire confiance aux Arabes", tel est le sentiment qui semble prévaloir dans une partie de la population. L'Intifada fournit le prétexte à Israël de renforcer sa domination militaire et renforce la passivité des Occidentaux qui pensent qu'en ripostant par les armes, Israël applique simplement le principe de légitime défense. Si les attentats-suicides ignobles frappant des innocents attirent à juste titre l'opprobre des médias, ils ont aussi pour effet de relativiser le terrorisme d'Etat israélien, qui est pour autant d'une toute autre ampleur, puisqu'il revient à bombarder la population civile, envoyer les bulldozers entourés de chars détruire de nuit des maisons (habitées), tirer des missiles sur des enfants qui jettent des cailloux… De septembre 2000 à mai 2001, les Israéliens ont notamment détruit 12 églises chrétiennes, 30 mosquées, 4000 maisons, 280 000 oliviers et autres arbres fruitiers et 261 hectares ont été confisqués au profit de l'expansion de colonies israéliennes.
Déjà précaire, l'économie des territoires palestiniens s'effondre. La Cisjordanie compte 80% de chômeurs. En violation directe des conventions internationales, Tsahal bloque les convois humanitaires. Comme devait le reconnaître le 13 août 2001 même Shimon Pérès, ministre travailliste des affaires étrangères israélien, devant le comité central de son parti : "Nous faisons face à un peuple qui compte trois millions de personnes dans les territoires palestiniens (…) Il est impossible d'accepter le fait qu'ils vivent depuis dix mois dans une situation de blocus, militaire et économique. De quelle autonomie disposent les Palestiniens quand nous avons la main sur tous les robinets ?"
Ces faits devaient être rappelés afin de bien comprendre le caractère politique et non directement religieux du conflit israélo-palestinien, même si les trois grandes religions monothéistes sont présentes. Mal informés, certains amalgament Palestiniens et Islamistes. Or il faut savoir, par exemple, que l'OLP n'est pas une organisation islamique mais laïque, où les chrétiens sont actifs, occupent des postes importants, et travaillent en bonne intelligence avec les musulmans. En effet, les chrétiens de Palestine ont subi le même sort que leurs concitoyens musulmans. Israël les a placés eux aussi face à l'alternative suivante : devenir des citoyens de troisième catégorie dans l'Etat hébreu ou partir pour les camps de réfugiés. La plupart adoptèrent la seconde solution, quand ils ne choisirent pas de quitter la région: les chrétiens palestiniens sont aujourd'hui plus nombreux au Chili qu'en Palestine, à Sydney qu'à Jérusalem. Après 2000 ans de présence en Terre sainte, les chrétiens ne sont plus que 50 000 sur trois millions de Palestiniens. Bethléem qui, avant 1948, en comptait 11 000 sur 15 000 habitants, n'en a plus aujourd'hui que 9800 sur 24 000.

Jérusalem

Les antagonismes se cristallisent autour de Jérusalem (oubliée dans les accords d'Oslo), en raison de l'importance de la Ville sainte pour les différents protagonistes : les deux peuples (palestinien et juif) et les trois religions (christianisme, judaïsme et islam). Par la loi fondamentale du 30 juillet 1980, Jérusalem a été déclarée capitale éternelle et indivisible de l'Etat d'Israël. L'Onu et le Saint-Siège ont aussitôt déclaré cette loi fondamentale "nulle et non avenue", mais Israël n'a cure de leur jugement et a toujours refusé de transiger sur ce point. De leur côté, les Palestiniens veulent faire de Jérusalem la capitale de leur futur Etat. Pour bloquer

ce projet, l'Etat hébreu, après avoir annexé Jérusalem-Est (la ville arabe) lors de la Guerre des Six Jours (1967), utilise tous les moyens pour en chasser les Palestiniens. Refus de permis de construire, destruction d'habitations, privation du droit d'y résider ou d'y travailler, discrimination, fiscalité dissuasive. Par contre, les Israéliens juifs se voient offrir de multiples avantages. Quant aux chrétiens de Jérusalem, leur nombre est passé de 34 000 à 7000. Si l'évolution actuelle se poursuit, il n'en restera plus dans vingt ans. Par ailleurs, Israël tente d'attiser les querelles entre chrétiens et musulmans, comme on l'a vu avec l'affaire de la mosquée de Nazareth.
L'Eglise a toujours été extrêmement préoccupée par le sort de Jérusalem. En 1948, Pie XII demandait déjà "un statut international juridiquement établi et garanti" pour cette ville unique au monde. Cette revendication, partagée par nombre d'observateurs même non-chrétiens (et par l'OLP), n'a pas changé. Comme l'expliquait Mgr Michel Sabbah, patriarche latin de la ville, "Jérusalem est une ville sainte. Elle a par cette sainteté un caractère singulier qui la distingue de toutes les villes du monde. C'est pourquoi, elle ne peut ressembler dans son statut à aucune autre ville ou capitale au monde. Elle exige un statut particulier qui garantit le droit de tous ses habitants et des trois religions en elle, qui garantit son caractère de sainteté et son caractère culturel propre, la place au-dessus des guerres et des hostilités et en garantit le libre accès à tous, amis ou ennemis, en temps de paix ou de guerre. Il revient aux deux peuples intéressés, Israéliens et Palestiniens, avec la collaboration des religions concernées, judaïsme, christianisme et islam, de définir ce statut particulier et de gouverner la ville selon ce statut. La communauté internationale, de son côté, et l'humanité entière ont le devoir d'aider les deux peuples à trouver ce statut particulier. La reconnaissance de ce statut par la communauté internationale lui sera une garantie de stabilité. Dans le cadre de ce statut particulier, Jérusalem peut être "capitale" pour les deux peuples concernés et pour deux États, devenant ainsi le berceau et le symbole de la reconnaissance mutuelle et de la coexistence fraternelle entre Palestiniens et Israéliens. Elle sera aussi symbole et source de paix pour tous les peuples de la région et de la terre."
La paix est l'oeuvre de la justice, et celle ci consiste à reconnaître et respecter les droits et les devoirs tant des personnes que des peuples afin de rendre à chacun son dû. Tant que les droits sont bafoués, tant que les libertés sont piétinées, la recherche de la paix est une illusion. La paix n'est pas l'oppression silencieuse imposée par la force des armes. Une paix injuste – véritable oxymoron – ne peut qu'enfanter une nouvelle guerre, plus meurtrière encore. Comme le rappelle le Catéchisme de l'Eglise catholique (2304), "la paix n'est pas seulement absence de guerre et elle ne se borne pas à assurer l'équilibre des forces adverses. La paix ne peut s'obtenir sur terre sans la sauvegarde des biens des personnes, la libre communication entre les êtres humains, le respect de la dignité des personnes et des peuples, la pratique assidue de la fraternité. Elle est tranquillité de l'ordre (saint Augustin)."
Une chose est établie : dans la situation présente, la violence ne résout rien. Les Palestiniens s'avèrent bien démunis : une seule après-midi suffirait à l'armée israélienne pour envahir la totalité des territoires relevant de l'Autorité palestinienne.
La solution du problème est double : reconnaître aux Palestiniens le droit de disposer d'un Etat libre et indépendant, donner un statut spécifique à Jérusalem, garanti par la communauté internationale. La paix reviendra, lorsque cesseront l'oppression et la défiance et lorsque la Ville sainte sera à nouveau libre. A la spirale mimétique de la violence, pour reprendre la terminologie de René Girard, tous les hommes véritablement religieux doivent opposer une vision de paix et de réconciliation, comme l'Église par la voix de ses papes ne cesse de le rappeler, sans se lasser. Pax, salam, shalom. Nous n'oublierons pas Jérusalem.
Denis SUREAU

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Pape François et Dominique Wolton : un coup d'édition, un livre décevant

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Pape François
Dominique Wolton

Politique et société

L'Observatoire, 418 p., 21 €

Le pape François s'est entretenu douze fois en un an avec Dominique Wolton, directeur de recherche au CNRS, sociologue de la communication, agnostique ne connaissant l’Église et la foi que de l'extérieur.

Le projet était alléchant mais le résultat s'avère décevant. Sur les quatre cent pages du livre, les réponses du pape n'occupent d'ailleurs qu'une place limitée. Wolton est bavard au point qu'après deux pages de considérations personnelles (dont à vrai dire le lecteur se moque), le pape ne répond parfois que par un « oui » ou quelques mots. 
De plus, le propos est très horizontal, peu théologique ou spirituel. Néanmoins, ce document a le mérite d'éclairer un peu la personnalité du pape venu d'Argentine. Il contient aussi des phrases qui font mouche, comme lorsqu'interrogé sur l'attitude de l'Europe face aux migrants, François déclare : « Si les Européens veulent rester entre eux, qu'ils fassent des enfants ! » Ou lorsqu'il critique la laïcité à la française, qui « a une coloration héritée des Lumières beaucoup trop forte, qui construit un imaginaire collectif dans lequel les religions sont vues comme une sous-culture ». Certains propos rapides ont suscité des réactions d'incompréhension (« aucune guerre n'est juste »), et l'on atteint ici les limites de l'exercice.
 

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Média participations futur troisième éditeur français

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Média Participations, quatrième groupe d’édition français, éditeur de l'hebdomadaire Famille chrétienne et du missel de poche Magnificat, de livres religieux (Mame, Edifa, Desclée, Tardy...)

ou pratiques (Rustica), numéro un de la bande dessinée en Europe (Dargaud, Dupuis, Lombard...), qui a repris en juin dernier les Éditions Anne Carrière, a engagé des négociations exclusives avec La Martinière, septième groupe français (Seuil, Éditions de 
La Martinière, Points, Don Quichotte, l'américain Abrams, etc.). 
Si elles aboutissent, les deux groupes Média Participations (355 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2016 et plus de 1000 salariés), piloté par Vincent Montagne, et La Martinière (206 millions d’euros et 500 salariés), présidé par Hervé de La Martinière, pèseront donc 560 millions d’euros, devenant le troisième éditeur français, derrière Hachette et Editis, et le vingt-sixième mondial.

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