Déraison sanitaire
Alain relevait que chez les Modernes la préservation de la santé a remplacé la quête du salut. La réponse étatique à la pandémie présente confirme au plus haut la réflexion du philosophe. Alexandra Laignel-Lavastine, universitaire et essayiste (juive), spécialiste des dissidents des anciens pays de l’Est (Havel, Patočka), dénonce avec vigueur « le culte de la vie par-dessus tout », la réduction de l’existence humaine au pur biologique, comme s’il n’y avait pas des biens supérieurs. Et comme si la pandémie actuelle était sans précédent (la grippe de Hong Kong en 1968 a pourtant tué un million de personnes dont
30 000 en France). Elle critique « la cauchemardesque transformation de l’État en une immense machine disciplinaire à tout mobiliser pour tout immobiliser ». Un État qui n’a rien prévu, qui a menti (« le masque est inutile »), qui a suspendu les libertés, la justice, et l’Assemblée nationale, qui a laissé dans Ehpad des gens mourir de chagrin, qui a détruit des pans entiers de l’économie. « Si la raison sanitaire l’emporte au point de tout autoriser, c’est la tyrannie de la santé, la déraison et la décivilisation qui nous attendent au tournant. »
A méditer.